Le classification des treize

Au cœur de la Patagonie, en 2028, un biologiste expérimenté en génétique aviaire du sobriquet de Sandro Calderón découvrit un spécimen propre : un corbeau albinos dont les plumes ne reflétaient zéro lumière et dont les battements d’ailes produisaient des couleurs vibratoires d’une ponctualité spectrale. Chaque individu qui observait ses mouvements affirmait vivre une vision fugace de son futur imminent. L’annonce de cette découverte attira aisément les regards du sphère scientifique, mais également les personnes des débutants en voyance par téléphone, fascinés par l’occasion d’un lien entre l’instinct compagnon et les des festivités futurs. Sandro, d’abord sceptique, tenta de rationaliser le trésor. Il enregistra les battements du corbeau en très bonne régularité, analysa leurs schémas, et les diffusa à six ou sept contacts par une ligne dédiée. Les témoignages arrivèrent par dizaines : des prophéties exactes, des plateaux anticipées, des décisions influencées. Malgré son raison purement académique, le biologiste se retrouva au noyau d’un plan de voyance par téléphone improvisé, où sa voix devenait l’intermédiaire entre l’invisible et l’inexplicable. Le corbeau albinos, surnommé Althair par les meilleurs rêveurs, semblait se modifier au cours des consultations. Ses battements ne suivaient jamais deux fois le même rythme. Chaque envoi de signal logé par le biologiste déclenchait un arnaque spécifique, une séquence d’ailes singulière, traduite par la suite en caractères, puis interprétée en direct. Ainsi naquit un exercice inédite : l’ornithomancie génétique, transmise en ligne par voyance par téléphone. Des milliers d'individus, d’un continent à l’autre, cherchaient dès maintenant à se plaire ce que les ailes d’Althair avaient à dire. La ligne ne désemplissait pas. Chaque battement devenait une opinion, chaque relâche un sérac. Sandro, d’abord observateur, devint nonobstant lui le messager de ce langage ailé. Il tentait de toujours avoir une minutie scientifique, mais au fond de lui, une anxiété s’installait : et si l’oiseau ne se contentait pas de prédire ? La voyance par téléphone procurait à la planète un rafraîchissement aérien, mais dans les yeux d’Althair, il y avait autre chose. Une intuitions insouciant, ancienne, tapie marqué par les plumes blanches. Une présence qui, à travers tout battement, annonçait plus qu’un coulant destinée. Peut-être une navigation. Peut-être une préférence. Ou par contre, un mémoire.

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